samedi 12 octobre 2024

Khorassan

Dernières modifications le 4 février·7 minutes de lecture

Cet article est une annexe de “du Nil à l’Euphrate”. Je me vois contraint de le faire car l’article d’origine commence à être trop lourdement chargé. De plus, il peut être lu indépendamment du premier.

Alors que je n’étais pas encore converti à l’Islam et que je n’avais fait que me renseigner auprès de deux musulmans rencontrés dans le RER, je me voyais déjà me faire offrir un mini-livre sur la fin des temps. Il y était question des dix signes annonciateurs et des événements qui allaient se dérouler. Avant même de savoir quoi que ce soit de l’Histoire, il fallait que je connaisse la fin. Le monde musulman n’avait pas attendu internet pour diffuser toutes les informations liées à l’eschatologie. Bien entendu sur internet le sujet s’avère inépuisable. Toute personne ayant fréquenté une mosquée sait que le sujet revient souvent. Il y a même des cours avec des spécialistes sur le sujet.
Assez vite, je voyais bien qu’il y avait un gros problème. Mais au fond, si je ne m’attardais pas sur les détails, j’adhérais à l’idée de traverser une période qui amènerait la paix sur terre à force d’entendre et lire toujours les mêmes choses. Après ce ne sont que des variantes suivant le camp choisi par chacun. Chacun pensant être dans le camp des gagnants de la fin, bien entendu.

Parmi les grands signes, il y a la venue de deux personnages: le Mahdi et le Dajjal. Je vais tenter de vous faire une copie pertinente:

Le Mahdi
Les chrétiens demanderont ceux qu’ils recherchent et les musulmans leurs répondront: "Par Allah! Ils sont nos frères. Nous ne vous les livreront jamais." Cela commencera la guerre. Un tiers des musulmans s’enfuira. Leur repentance ‘Tawbah’ ne sera jamais acceptée. Un tiers sera tué.

Ils seront les meilleurs 'Shahid' (martyrs) auprès d’Allah. Le dernier tiers sera victorieux jusqu’à ce que, sous le commandement de l’Imam Mahdi, ils combattront les Koufars mécréants) et les anéantiront.
Ce groupe du Khurasan. Ils porteront des turbans noirs.
Les gens se lèveront de l’est et ne cesseront de s’élancer, piétant le sol, à l’aide de l’Imam Mahdi pour aider à l’établissement de son gouvernement.
Du Khurasan émergeront les bannières noires que nul ne pourra refouler (et elles, les bannières noires continueront d’avancer) jusqu’à ce qu’ils atteignent ‘Illya (Jérusalem) et qu’ils plantent leurs drapeaux dans sa terre.

Voici ce qu'on peut lire de la biographie de Abû Muslim al-Khurâsânî:De son vrai nom zoroastrien Vehzādān Pour Vandād Hormozd, né à Balkh en 718 ou 719, mort en février 755, est un général abbasside, fils d'un zoroastrien persan, Khorassanien originaire de Mahan, petite bourgade située près de Merv. On le nomme parfois « fondateur de l'Empire abbasside ». Abû Muslim fut un grand défenseur de la cause abbasside, il rencontra leur Imam Ibrahim ben Muhammad à La Mecque et devint plus tard un ami personnel d'`Abû al-`Abbas as-Saffah, le futur Calife.  Il fut envoyé à Merv par les Abbassides en 747, contre le gouverneur Nasr, qui avait tenté de s'allier à l'insurgé sogdienHarith Ibn Sarayi.  C'est en janvier 748 qu'avec 10 000 hommes Abû Muslim marche finalement sur Merv, capitale du Khorassan, d'où il chasse Nasr. Le poursuivant, il met en déroute les deux armées que les Omeyyades avaient envoyé contre lui, obligeant le calife Marwan II à se réfugier en Égypte. Son rôle héroïque dans la révolution et ses compétences militaires, ainsi que sa politique de conciliation envers les chiites, les sunnites, les zoroastriens, les juifs et les chrétiens, l'ont rendu extrêmement populaire parmi le peuple. Il est devenu une figure légendaire pour beaucoup en Perse, et plusieurs hérétiques persans ont commencé des révoltes en affirmant qu'il n'était pas mort et qu'il reviendrait. À peine Abû Muslim mort, son ancien ministre des finances Simbad de Nichapur tente de le venger. Celui-ci est arrêté à Hamadan en 755 après avoir guerroyé dans le nord de l'Iran. Le suivent Ishaq, qui s'était proclamé successeur de Zarathoustra (échec en 757) puis le mazdéen Oustad Sis, qui après s'être emparé de la plupart des villes aidé de 300 000 hommes, échoue en 767.

Source en anglais: https://en.wikipedia.org/wiki/Abu_Muslim

Bien entendu, on peut argumenter sur bien des détails, mais il est clair que Abu Muslim correspond à l’idée que l’on se fait d’un personnage comme le Mahdi. Il vient du Khorassan. Il y lève une armée, remporte des victoires puis se dirige vers l’ouest, vers le siège du califat. On peut très bien imaginer que pour constituer une armée rebelle à l’autorité califale, il faut trouver une légitimité religieuse. Il a donc fallu propager une légende au sujet de ce chef de guerre. Ensuite la victoire acquise a amplifié cette légende. Enfin ses partisans ont contribué à la poursuivre. Tous ces récits sont venu illustrer les concepts eschatologiques présents dans le zoroastrisme.

Le Dajjal
"Le Dajjal émergera dans une terre à l’est nommée Khurasan ..." Sahih, Sahih ibn Majah: 4072
Comme vous le savez, le Dajjal est connu pour être borgne parmi une quantité de description parfois contradictoires. Il se présente comme prophète, réalise de grands miracles et enfin se proclame Dieu lui-même.

Parmi les partisans d’Abu Muslim, nous trouvons un certain Hashim Al muqanna.
https://en.wikipedia.org/wiki/Al-Muqanna
Ce personnage est beaucoup plus énigmatique. Initialement, il était donc un partisan d’Abu Muslim et a participé à sa victoire contre les Ommeyades. Il était donc du coté des musulmans qui ont remporté le califat. Mais Abu Muslim avait de nombreux ennemis et il fut assassiné. Après sa mort, Hashim déclara que celui-ci était le Mahdi et qu’il était son successeur. Puis qu’il était Dieu lui-même. Il fonda une secte et entreprit des razzias. Il fut alors considéré comme ennemi du nouveau califat et éliminé. Il peut donc être considéré comme un traître. Est-ce à dire que sa future traîtrise avait été anticipée? Ou bien que son histoire a été réécrite plus tard dans des prophéties annonçant son arrivée? Fort possible.
Ce que nous pouvons lire c’est qu’il fut victime d’une explosion au visage, le forçant à porter un voile (muqanna). Il est tout à fait envisageable que ce voile était destiné à cacher un oeil borgne. On peut aussi faire le lien avec le voile porté par les prêtres zoroastriens. Ce voile, qui couvre seulement le bas du visage, est destiné à protéger le feu sacré de l’impureté de la salive projetée pendant la prière.

Voici la photo d’un inconnu que l’on peut supposer prêtre:

dynastie des Tang, Shanxi, inconnu au visage voilé, 600-750

 

Les zoroastriens Sogdians avait une présence visible dans la Chine des Tang.

En 1787, c’est à dire avant le début de la révolution, Napoléon Bonaparte écrivit une nouvelle de deux pages sur Al-Muqanna intitulée ‘Le Masque prophète’.
http://www.bmlisieux.com/archives/bonapart.htm

Des pièces d’al-Muqanna ont été découvertes, mentionnées dans une œuvre du Dr Boris Kochnev. Les pièces avaient d’un côté ‘Allah a ordonné fidélité et justice’, en écriture coufique, et de l’autre côté, ‘Hashim, wali Abi Muslim هاشم ولي أبي مسلم’, ce qui signifie: allié Hashim d’Abu Muslim).

Le mouvement d’al-Muqanna n’est pas mort après son suicide, mais a continué à vivre jusqu’au 12ème siècle parmi les ‘Gens en vêtements blancs’, qui attendaient son retour. Comme pour Sunpadh et al-Muqanna, une autre révolte, cette fois de Babak بابك الخرمي a suivi, avec des néo-mazdakites comme les deux autres, sous la forme des Khurramiyah الخرمية.]