22.2

Dernières modifications: 2 avril 2025 – 2560 mots

Mat 5.17
Ne pensez pas que je sois venu pour abroger la Loi ou les Prophètes;
je ne suis pas venu pour abroger, mais pour accomplir.
Car en vérité, je vous le dis, jusqu’à ce que le ciel et la terre passent, un seul Yod ou un seul trait de lettre de la Loi ne passera certainement pas avant que tout ne soit arrivé.

Avec un Yod, on déplace des montagnes.
Le mont Moriah, plus connu sous la dénomination mont du Temple, lieu central de la Torah judéenne, actuellement lieu de toutes les convoitises entre les deux factions sémites. De l’autre, le mont Moreh, issu de la Torah samaritaine, dont l’emplacement demeure incertain selon le consensus scientifique, mais qui se situerait bien  plus au nord. Si c’est un lieu qui divise sur la question de la ligature du fils d’Abraham, paix sur lui, c’est aussi le lieu qui connecte l’Islam moderne au monde rabbinique par le mythe du voyage nocturne. Depuis le 7 janvier 2015, les montagnes veulent revenir à leurs places. Mais certains font tout pour empêcher cela. Envers et contre tout. Ils préfèrent mourir au combat, commettre des atrocités, plutôt que d’accepter leur erreur. Et voilà que le monde entier est pris en otage, sommé de prendre parti pour les uns ou pour les autres. La montagne serait sainte, ils n’en démordent pas. Celle-ci et pas une autre. Selon la façon qu’ils ont de lire le Livre,  il est écrit que le Créateur les a chargé de la garde de cette montagne.

Émettre une critique à l’encontre de cette volonté d’accaparement et c’est l’accusation de trahison. Il s’agit d’être solidaire avec ses frères en religion ou ses cousins pour les autres ou ses aînés. Des enfants qui pleurent, des corps déchiquetés à terre. Il faut s’apitoyer. Il faut se donner bonne conscience. C’est un devoir de croyant. C’est la foi de chacun qui est engagée. Celui qui ne donne pas de l’argent pour la cause est un hypocrite, il ne fait pas parti de la communauté des VRAIS croyants. Peut-être de l’autre, la fausse. Celle d’en face.

Voilà maintenant 9  ans que je porte le poids de cette connaissance. Mais qu’est-ce que 9 ans d’une vie au regard de ce drame sans fin? On apprend à vivre avec. Que peut-on faire? Qui va écouter? Est-ce que cela intéresse les gens la vérité? Non. Si tu ne veux pas avoir d’ennui au pire et si tu ne veux pas au mieux passer des heures à argumenter pour absolument aucun résultat, autant te taire. Heureusement, dans ces articles, je peux encore m’exprimer. Je ne m’en prive pas mais les retombées sont nulles.

Il se trouve qu’en ce moment j’étudie la Septante. La Septante est une traduction grecque du -3ème siècle de la Bible judéenne. Elle a servi de base pour la théologie chrétienne, ainsi que pour les traductions dans les diverses langues en usage à l’époque. Au 4ème siècle, Jérôme propose une traduction en latin de la Bible. Elle est nommée Vulgate. Concernant la Torah en elle-même, la traduction est opérée non pas depuis la Septante mais depuis l’hébreu. L’homme a été vivement critiqué pour son choix. Le support officiel était la Septante. La Bible hébraïque est la version du camp d’en face. Ceux qui n’accepteront jamais le principe trinitaire. « Ainsi, l’usage de la Vulgate ne se généralise pas avant le IXe siècle tandis que l’usage et les copies de la Vetus Latina restent répandus parmi les moines et clercs érudits jusqu’au XIIIe siècle. » La version actuelle officielle est composite et se nomme neo-vulgate.

Dans la Vulgate (accessible en ligne), on parle aussi de la montagne:

G 22:2 ait ei tolle filium tuum unigenitum quem diligis  et vade in terram Visionis atque offer eum ibi holocaustum super unum montium quem monstravero tibi
22.2 Il reprit: « Prends ton fils, ton fils unique, celui que tu aimes; achemine-toi vers la terre de la vision, et offre le « en montée » (les holocaustes sont des montées) sur une montagne que je te désignerai.
Je me suis permis d’enlever le nom Isaac, paix sur lui, et ce dans toutes les versions. J’imagine qu’à la fin de cet article personne n’osera m’en tenir rigueur. Il faut dire que je suis fatigué des mensonges. Pour plus de détails sur le sujet, voir plus bas. Nous allons nous intéresser à trois mots en particulier: in terram visionis. Même si on ne parle pas latin, force est de reconnaître qu’il est assez aisé de comprendre ce que Jérôme a voulu traduire ici. « Dans la terre de la vision » ou pour être plus précis « dans la terre de Vision« . La traduction grecque de Symmachus (Symmaque l’Ébionite (en grec ancien Ἐβιωνίτης Σύμμαχος / Ebiônítês Súmmakhos)  a vécu vers la fin du IIe siècle) rend le nom de lieu de Genèse 22.2  par « tês optasías » : ὀπτασία : strong 3701 (« au pays de l’apparition/manifestation/vision»).
Quel rapport avec le sacrifice avorté d’Abraham, paix sur lui?
Nous allons tenter de revenir du latin à l’hébreu. Il se trouve que « de vision » en hébreu se dit המַרְאֶה haMareh. Le texte brut en hébreu serait המראה. En choisissant une vocalisation différente, avec les mêmes lettres, nous avons haMoreh.
L’ennui ici, c’est que dans la Bible hébraïque moderne, on lit: al-erets haMoriah: אֶל-אֶרֶץ הַמֹּרִיָּה : la terre de Moriah. Moriah, vous savez, c’est la fameuse montagne convoitée par tous. Un Yod sépare les deux mots. On y voit des mosquées qui brillent représentées sur des drapeaux, on y voit des hommes en noir qui se balancent d’avant en arrière devant un mur. Si tu ne la vois pas la sainteté, c’est que tu es aveugle!
Décidément, notre Créateur est Taquin. Il se trouve que המּריה veut dire « de Désobéissance » (voir notes). Bien sur, dans la droite lignée du plus beau raisonnement circulaire qui soit, certains affirmeront que Moriah signifie « crainte de Dieu » ou « enseignement de Dieu ».
Si on lit « littéralement » le verset de Genèse:
2 Il reprit « Prends ton fils, ton fils unique, celui que tu aimes; achemine-toi vers la terre de (la) désobéissance et sacrifie-le sur la montagne que je te montrerai.
Fâcheux pour des littéralistes. Les uns et les autres.
La question, elle est vite répondue: pour une raison étrange, Jérôme a préféré traduire ce passage de Genèse depuis la Bible Samaritaine. Ou bien cette version est plus récente et modifiée par d’autres mains. Nous ne saurons jamais vraiment ce qu’il en est.  Après tout, qui se soucie vraiment ne serait-ce que de l’existence des Samaritains? Est-ce pour autant que les uns et les autres doivent pousser des soupirs de soulagement?
Voici la suite du passage en hébreu (Bible judéenne):
22.4 Le troisième jour, Abraham, levant les yeux, vit (יַּרְא : Yira) le lieu de loin.
22.14 Abraham donna à ce lieu le nom de YHWH Yireh( יְהוָה יִרְאֶה ). Quiconque dit aujourd’hui: « à la montagne de l’Éternel, il verra( בְּהַר יְהוָה יֵרָאֶה) ».
Ra’ah: voir : רָאָה : Strong 7200
Non, ne soupirez pas, car maintenant nous allons dans l’arabe:
قَدْ صَدَّقْتَ ٱلرُّءْيَآ ۚ إِنَّا كَذَٰلِكَ نَجْزِى ٱلْمُحْسِنِينَ
37.105 Qad Şaddaqta Ar-Ru’uyā ‘Innā Kadhālika Najzī Al-Muĥsinīna

37.102 Puis quand celui-ci fut en âge de l’accompagner, [Ibrahim (Abraham)] dit: « Ô mon fils, je me vois en songe en train de t’immoler. Vois donc ce que tu en penses. »
(Isma’il (Ismaël)) dit: « Ô mon cher père, fais ce qui t’es commandé: tu me trouveras, s’il plaît à Allah, du nombre des endurants. »
103 Puis quand tous deux se furent soumis et  qu’il l’eut jeté sur le front,
104 voilà que Nous l’appelâmes: « Ibrahim (Abraham)!
105 Tu as cru en la vision. C’est ainsi que Nous récompensons les bienfaisants. »

Raā : voir : رَأَى

Retour à Moreh

Mis à jour 2/4/25

Nous pouvons ajouter ceci: dans le cas où nous sommes à Moreh, ce lieu n’est pas inconnu dans Genèse. Nous le retrouvons au chapitre 12:

Gn 12.7 L’Éternel apparut à Abram et dit : »C’est à ta postérité que je destine ce pays. » Il bâtit en ce lieu un autel au Dieu qui lui était apparu.

Dans ce verset, le verbe Raā apparait deux fois. C’est ce miracle de  vision qui pousse Abraham, paix sur lui, à établir un autel en ce lieu. Le nom du lieu est donné dans le verset précédent:

6 Abram s’avança dans le pays jusqu’au territoire de Sichem, jusqu’à la plaine de Môreh; et le Cananéen habitait dès lors ce pays.

Il semblerait que le lieu soit connu pour être un lieu de vision prophétique, à moins que le lieu ne soit nommé par anticipation comme c’est parfois le cas dans la Bible.

Tout cela est intéressant, mais il nous faut retourner dans Gn 22.

22.8 Abraham répondit: « Dieu choisira lui-même l’agneau de l’holocauste mon fils! » (rabbinat)
22.8 Abraham répondit: Mon fils, Dieu se pourvoira lui-même de l’agneau pour l’holocauste. (Segond)

Le passage plus précisément:
אֱלֹהִים יִרְאֶה-לּוֹ הַשֶּׂה לְעֹלָה
ĕlōhîm yireh-lōw haśśeh lə‘ōlāh

Dieu verra pour Lui l’agneau pour la montée. Le choix du verbe « voir » ici n’est pas une figure de style. Si les traductions juives et chrétiennes contournent l’action de « voir » pour traduire par un verbe d’action comme « pourvoir » ou choisir » qui ne fait qu’approcher le sens, c’est pour une bonne raison. Abraham, paix sur lui, connait déjà cet endroit car il y a déjà eu une vision. Telle que la version de la Bible est, y compris en hébreu, en ce moment, les deux évènements des chapitres 12 et 22 sont dissociés. Mais si on les relie ensemble alors nous comprenons que la phrase prononcée par Abraham à ce moment là est une phrase qui exprime son espoir en la Miséricorde divine. Ce lieu est l’endroit où il a eu sa première vision quand il est arrivé en Canaan. Dans cette vision, Dieu lui a fait la promesse de ce pays et d’une descendance innombrable. Abraham, paix sur lui, sait en son coeur que cette promesse va s’accomplir et que le fils qui l’accompagne en fait parti. Il sait qu’il ne peut pas mourir. Cependant, il va au bout de la vision où il se voit en train de l’immoler et il poursuit son action. Il sait que Dieu va arrêter son geste. Il sait que Dieu verra à son agneau. Mais que cet agneau n’est pas son fils.

Le verset 37.105 vient conclure en affirmant  « Tu as cru en la vision. » Cette vision est en réalité la première qu’il a eu en arrivant en Canaan en ce même endroit, à coté de Sichem, celle d’une descendance innombrable.

Abraham, paix sur lui, est donc innocent de toute volonté de sacrifier son fils et l’Éternel n’a jamais donné cet ordre.

« Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru. » aurait-on dit pour justifier de suivre des menteurs au sein d’une toute autre faction. Décidément cet évangile gnostique demeure la boussole inversée.

Au passage corrigeons l’interprétation du Coran pour l’expression: watallahu lil’jabīni

gabion: גַּבְנֹן : 1386

Définition : Bosse, Bossu; Signification : une bosse, un sommet de collines
Origine du mot : Dérivé de la racine גָּבַן (gaban), qui n’est pas utilisée dans la Bible hébraïque mais est liée au concept de courbure ou de bosse. جَبِينِ ⇔ גַּבְנֹן
La racine TLL en arabe fait référence à une colline : tall : تلّ. On en déduit le verbe d’action de « monter sur la colline ».

  Qu 37.103 Puis quand tous deux se furent soumis et qu’il l’eut monté sur le sommet arrondi de la colline.

Cet aspect arrondi qui est suggéré par le terme jabin d’origine hébraïque, nous rappelle le lien qui s’établit à la fois avec Joseph, paix sur lui, qui est emprisonné dans un espace en forme de cercle, et le Messie qui est crucifié sur un endroit de la forme de la sphère d’un crane. https://www.stephanpain.com/2024/12/20/jour-du-jugement/

Quittons-nous avec la Septante:

Gn 22.2 καὶ εἶπεν Λαβὲ τὸν υἱόν σου τὸν ἀγαπητόν, ὃν ἠγάπησας, καὶ πορεύθητι εἰς τὴν γῆν τὴν ὑψηλὴν καὶ ἀνένεγκον αὐτὸν ἐκεῖ εἰς ὁλοκάρπωσιν ἐφ ἓν τῶν ὀρέων, ὧν ἄν σοι εἴπω.
Qui peut se traduire ainsi, sans aucune volonté de sacrifier sa descendance en affirmant qu’il s’agit là de l’ordre qui aurait été donné par notre Créateur:
 et va dans les hauteurs et élève-le là pour qu’il porte pleinement ses fruits/à sa pleine réalisation
Heureux ceux qui voient et qui croient.
Bienvenue  à eux.

Notes:

• Vision Pro
2 février 2024: sortie du Vision Pro, le casque VR/AR de la célèbre firme au fruit de l’arbre de la connaissance selon les traductions usuelles en occident, aux États-Unis. (ajout du 6/2)

Isaac/Jacob
Il me semble important d’ajouter quelques compléments sur le sujet. Tout d’abord il est pertinent de remarquer la particularité de l’annonce d’Isaac, paix sur lui. Nous la retrouvons en double. Si les épisodes de l’Exode sont répétés et mélangés, ce n’est pas le cas des récits inclus dans la Genèse. Cette annonce se trouve au chapitre 17 et 18. Dans le 17, le récit n’est pas situé géographiquement mais temporellement. C’est l’Éternel qui apparait à Abraham, paix sur lui. Le sujet central est l’Alliance et son marqueur la circoncision. Il est annoncé une grande nation issue d’Ismaël, paix sur lui, composée de 12 tribus. Dans le 18, l’action se situe proche des chênes de Mamré. Cette fois, ce sont trois hommes qui sont porteurs de l’annonce. Il n’est pas question d’Alliance mais de la destruction de Sodome. Il n’est pas possible de considérer que ces deux récits se succèdent car chacun témoigne de la surprise de l’annonce. Toutefois, nous pouvons tout de même imbriquer les deux passages comme si il s’agissait de la même histoire racontée de deux points de vue différents. Un seul détail ne fonctionne pas: le sens du nom Isaac. En effet, Isaac signifie littéralement « il rit », et fait référence à la réaction à l’annonce de la naissance. Dans le 17, c’est Abraham, paix sur lui, qui rit, tandis que dans le 18, c’est Sarah. Or que dit le Coran à ce sujet:

11.71 Son épouse était debout. Or elle éclata de rire car nous lui annonçâmes la bonne nouvelle d’Isaac et après Isaac, Jacob.

Nous pouvons donc conclure que le mot hébreu « Isaac » traduit par « il rit » en Gen 17.17 est un ajout au texte original. Si il a été ajouté à cet endroit, il  a pu l’être à d’autres. Poursuivons. Les exégètes musulmans font remarquer que la mention « fils unique » est répétée deux fois dans Gen 22. Si les commentateurs bibliques considèrent que seul le fils de Sarah puisse être considéré comme fils légitime, ce serait délégitimer quelques chapitres plus loin, une partie des 12 fils d’Israël qui sont des fils de servantes. Enfin, selon la théorie que j’exposais il y a quelques années, d’un prophète qui se jugerait coupable d’avoir interprété d’une manière quelque peu détournée la prophétie et qui souhaiterait réparer son erreur en supprimant le fils de sa servante, nous trouvons un argument qui va dans ce sens dans le texte même de la Genèse. En effet, voici l’une des phrases prononcées en réaction à l’annonce:

17.18 Abraham dit au Seigneur: « Puisse Ismaël, à tes yeux, mériter de vivre! »

Comme nous pouvons le constater, la nouvelle interprétation de 2025 convient aussi. Constatons que cette annonce précise d’un enfant né de Sara inquiète le prophète quant au devenir de celui qui est né afin de répondre à l’annonce d’une descendance à laquelle ils avaient tous deux pensé trouver une porte de sortie. Enfin, l’annonce de la venue d’Isaac, paix sur lui, est faite après l’épisode du sacrifice dans le Coran sourate 37. Tout trois sont prophètes. Ils sont élus et ce statut ne s’acquière pas par le mérite.

• Nous pouvons traduire « l’eut jeté » par « l’eut monté sur  la colline » car la racine TLL en arabe fait référence à une colline : tall : تلّ .
On trouve aussi « suis-le » comme traduction pour le verbe « tallahu » تَلَّهُ

Dessine-moi un mouton
https://www.stephanpain.com/2014/10/04/dessine-moi-un-mouton/

Le mirage du voyage
https://www.stephanpain.com/2015/06/03/le-mirage-du-voyage-2/

Moré/Moreh
https://www.stephanpain.com/2015/08/27/more/

Salem et Gomorrhe
https://www.stephanpain.com/2015/12/06/salem-et-gomorrhe/

La Phase
https://www.stephanpain.com/la-phase/

Apologie du négationnisme
https://www.stephanpain.com/2015/09/22/apologie-du-negationnisme/

https://www.stephanpain.com/2015/01/09/les-desseins-de-dieu/
https://www.stephanpain.com/2015/07/26/le-bon-samaritain/

optasia: an appearing
https://biblehub.com/interlinear/genesis/12.htm
https://biblehub.com/interlinear/genesis/22.htm