14 mai 2013, 12:17
Jusqu’à ce jour, mon fb était resté le même. Des photos postées commençant à dater, des souhaits de bon anniversaire. Il y avait juste la vidéo de la soirée du 26 Novembre du bal des Papillons. Me voilà à l’aube d’un nouveau jour et d’une nouvelle vie. Je marquais donc l’évènement d’un “Hello world” qui je l’imagine a du passer totalement inaperçu. Qu’importe.
Je me rendais donc au parvis et je rencontrais de nouvelles personnes. J’étais à ce moment là très exalté. Qui ne l’aurait pas été dans ma situation? Je pensais que les choses allaient aller vite, très vite. Il me fallait donc accomplir ma mission tambour battant. Ma présence au sein d’un groupe enthousiaste me faisait imaginer qu’il me suffisait de prendre la tête et de partir en guerre. Dans ma tête, il n’y avait aucun doute et je parlais aux gens comme si de rien n’était, comme si tout le monde savait. Heureusement pour moi, j’avais encore un soupçon de jugement et je me suis vite rendu compte que je devais temporiser. Nous ne sommes pas dans Matrix, on ne rebranche pas les gens aussi facilement que ça. La petite troupe se met en marche vers le centre de Paris. Au moment de passer les portillons du RER, un homme s’arrête à coté de nous et se met à hurler:
“Tout ça, c’est la faute des sionistes”.
Et il repart dans la foule, laissant le groupe interloqué. J’en profite pour glisser à mes compagnons:
“Voilà le genre de signes auxquelles il faut prêter attention.”
Il faut reconnaître qu’en l’occurrence, il était difficile d’être passé à coté. Cette cause politique était tout à fait nouvelle pour moi. Je n’y connaissais rien dans la problématique du moyen orient. J’étais tout simplement un français comme les autres, subissant l’éternel conflit aux informations. Tout en continuant à discuter avec cet enthousiasme que je n’avais jamais eu, nous nous rendons sur une petite place à coté de République. Une assemblée indignée. J’avoue que ce jour là, tout cela me paraissait bien dérisoire et je n’écoutais pas grand chose. Un garçon arrive avec un tract dans la main et commence à discuter avec nous. C’est un tract appelant au boycott des produits israéliens. Un sujet qui le concerne car il est investit dans le combat. Je fais le lien entre le tract et le type du RER, je montre qu’il s’agit d’un signe. Le garçon au tract me propose de m’accompagner pour aller en chercher un autre. Nous voilà parti tous les deux. C’est la première fois que je fais le coup de la pilule bleue et la rouge. Je me mets à parler naturellement, comme si j’avais fait un bond dans le temps de 2000 ans. Il faut croire que j’étais assez crédible, car bien qu’étant athée, il me crut instantanément. A moins qu’il m’ait pris pour un barge. Je regrette ces instants où j’étais moi-même, ils ont duré si peu de temps. Je suis revenu bien trop vite à une attitude plus policée. Nous retournons à l’assemblée et me revoilà parti avec un nouveau groupe qui se rend à un meeting de la révolution tunisienne à deux pas de là. L’un d’eux tarde à venir et nous attendons. Dans ces moments là, je demandais les prénoms de tout le monde et je cherchais leur signification pour comprendre le rôle de chacun. Une sorte de jeu de piste géant. Un jeu qui a toujours bien fonctionné. Je me retourne pour partir et me voilà nez à nez avec une jolie jeune fille. Un ange passe et elle me dit:
“Bonjour, je suis Noêlle.”
Je n’ai pas eu besoin de chercher ou de demander la signification de son prénom. Le message était clair et il marquait le réel début de l’aventure. La journée fut longue et riche en rencontre. J’ai du me faire à l’idée que ça allait être long et difficile, mais qu’importe, ma foi était grande, je n’avais aucun doute. Tout était réglé comme un ballet, je n’avais qu’à me laisser porter par le chef d’orchestre.
Ce soir là, il y avait une fête tunisienne en banlieue avec des musiciens. L’atmosphère était bon enfant. Le clou de la soirée était un trio musical dont l’un des membres ne passait pas inaperçu: il était aveugle. De plus, il semblait très populaire.. Je n’ai pu réprimer un frisson en le voyant, je comprenais qu’il n’y avait pas de hasard, qu’il allait se passer quelque chose. Il discutait avec ses amis à l’entrée juste à coté de moi. Mon cœur s’est mis à battre de plus en plus fort. On aurait dit qu’il semblait attendre que j’agisse. Mes pensées tournaient dans ma tête. Je ne connaissais rien de l’Evangile, mais la guérison de l’aveugle de naissance me paraissait être parmi les miracles les plus connus. Que devais-je faire? Cracher dans mes mains et lui mettre sur les yeux? Et si rien ne se passait? L’idée même de passer pour un illuminé me terrifiait. Il fallait à tout prix éviter cela. Le voilà seul à présent. Rien ne me retient d’aller le voir. Intérieurement c’est la panique. J’essaie désespérément de la cacher. Et puis je reprends mon calme, il faut réfléchir vraiment. Ne pas faire n’importe quoi. La tension retombe. Je décide de lui parler le plus simplement du monde. Je l’aborde en lui posant une question à travers ses verres opaques:
“Est- ce que tu penses qu’un truc qui a marché il y a 2000 ans, peut marcher de nos jours?”
Il me répond tout aussi simplement sans aucune marque de surprise:
” Je pense que toutes ces histoires sont des allégories, il s’agit de donner la foi, la lumière, à quelqu’un qui ne l’a jamais eu.”
Nous échangeâmes encore quelques phrases et il fut appelé sur scène. Ce soir là, j’ai compris la nature réel des miracles et que pour progresser, j’allais devoir toujours apprendre des autres.
C’était bien sur moi que le miracle avait eu lieu.