samedi 20 avril 2024

Le trésor

Dernières modifications le 24 janvier 2014·5 minutes de lecture

C’est l’histoire d’un homme qui cherchait la Vérité. Un rêve revenait souvent habiter ses nuits. Il avait entendu parler d’un monastère battu par les vents, au bord de la mer, qui était détenteur d’un secret de Dieu et dont la description semblait s’accorder avec sa vision nocturne. Il décida de s’y rendre afin de reprendre le secret des mains des moines et ainsi de le divulguer au monde.

Il arriva à la porte du monastère et les hommes lui firent bon accueil. Il prit part au repas du soir où l’on ne parlait que très peu selon les prescriptions en vigueur. Il osa tout de même parler du fameux secret. En vérité, lui répondit le moine chargé de s’occuper de lui, personne n’a su réellement faire parler ce secret depuis que nous sommes en sa possession. Cela fait maintenant plusieurs siècles qu’il se transmet au sein de la congrégation. Mais plus personne ne considère encore qu’il soit véridique. Il s’agit d’un fardeau plutôt qu’autre chose puisque nombres de voyageurs troublent notre quiétude pour s’enquérir de sa nature, sans réellement nous apporter en retour.

Je vois, fit l’homme. Vous êtes certes détenteurs d’une lourde responsabilité. Voudriez-vous que je vous débarrasse une bonne fois pour toute de ce secret?

Le moine lève les yeux au ciel: Puissiez-vous dire vrai! Hélas, c’est toujours le même refrain avec les gens de passage!

L’homme achève son repas et se dirige vers la cellule que l’on lui a attribué pour la nuit. Couché sur l’étroit et mince matelas, il contemple le plafond sans pouvoir s’endormir. Il a vu cet endroit en rêves tant de fois. Rien qui n’est en place ici ne se retrouve différemment dans ses souvenirs nocturnes. La porte d’entrée, la tour, les logements. Tout est à l’identique. Assurément, c’est bien ici qu’il va trouver une issue à sa quête. Il parvient à trouver le sommeil.

Il est réveillé très tôt, bien avant le lever du jour, par le moine qui lui est affecté.

Venez prendre part à nos cérémonies du matin. C’est aux premières lueurs de l’aube que nous sommes les plus proches de notre créateur. Peut-être consentira-t-Il à estomper le mystère pour vous?

L’homme emboite le pas du moine dans le dédale des couloirs. Ils arrivent bientôt dans une grande salle ornée d’une simple croix à son extrémité. Tous les moines sont là, à même le sol froid, à chuchoter dans la pénombre. L’homme les imite et demande dans sa prière que le Créateur exauce ses vœux de compréhension du secret et le comble de bienfaits. Le soleil se lève et l’homme est mené devant le responsable de la communauté. Celui-ci est assis sur une chaise derrière une simple table en bois en guise de bureau. Un dossier et quelques crayons, posés dans un des coins, témoignent du travail du frère. Il désigne à l’homme le tabouret qui lui fait face. L’homme s’y assied. Encore une fois, il retrouve les détails de son rêve dans cette scène. Un grand silence s’ensuit. Les deux hommes se scrutent.

Finalement, le responsable des moines, sort une petite boite de sa poche et la pose sur la table devant lui. Voilà tout.

L’homme, fortement ému par l’instant qu’il vit, reste un instant à observer cette boite sans oser s’en emparer. Enfin, il étend la main, la prend et la ramène à lui. Il ouvre le couvercle et regarde à l’intérieur. Ses yeux s’illuminent. Il referme la boite et relève les yeux vers le frère.

Elle est à vous si vous le désirez. Nous l’avons depuis bien trop longtemps. Personne n’a su nous dire ce que signifiait ceci. En vérité, nous pensons qu’il n’y a aucun secret ici et que nous sommes victimes d’une sorte de malédiction. Si nous pouvions nous éviter toutes ces allées et venues de personnes en quête de trésors mystiques dans nos murs, nous serions ravis.

Je peux vous débarrasser de ce fardeau, fait l’homme. Donnez-moi cette boite.

Le visage du moine s’éclaire tout à coup. Enfin!

Soit, elle est à vous. J’espère seulement que vous ne changerez pas d’avis. Je vous suggère de partir au plus vite.

Je m’en vais de ce pas, dit l’homme.

Il réunit ses quelques affaires et suit un autre frère qui le dirige vers la sortie. Arrivé dehors, il se met à courir tandis que la lourde porte en bois se referme dans un gémissement dans la quiétude du petit matin. Il court comme si ils pouvaient avoir changé d’avis et venir rechercher leur trésor.

Son cœur bat la chamade comme jamais. Il tient la boite contre son cœur comme dans son rêve. Le voilà sur la route du retour. Voilà le signe d’une nouvelle vie qui commence.

Au monastère, la nouvelle du départ de la boite vers d’autres cieux, se propage comme une trainée de poudre. Voilà nos pieux moines libérés de leur terrible fardeau. Bientôt la nouvelle va se répandre dans le pays, qu’ils ont confié le trésor à un voyageur.

Chacun d’entre eux, en son for intérieur, ne peut s’empêcher de penser que seul un fou peut se contenter d’une boite vide alors qu’il cherche un trésor.

Qu’il en soit ainsi.